Jeanne Hersch, philosophe des droits humains

Jeanne Hersch s'est intéressée aux droits humains pendant une bonne partie de sa vie, de 1956 à 1998, consacrant à ce problème de nombreux écrits et interventions publiques en tant que philosophe, fonctionnaire de l'UNESCO et militante politique socialiste dans le style de présence à son temps qui fut le sien. Les thèses principales de la réflexion de Jeanne Hersch sur les droits humains expriment non seulement la matrice existentialiste de sa philosophie – elle fut élève de Karl Jaspers –, mais également son réalisme. La philosophe voit dans la capacité de liberté de l'être humain et dans l'exigence absolue d'actualisation et d'affirmation de cettecapacité le fondement absolu et universel des droits humains. En même temps, cependant, elle cherche les conditions concrètes et réelles de l'actualisation et du développement de cette capacité de liberté, les conditions d'une «vie bonne», correspondant à l'objet des droits humains particuliers, politiques, civils, sociaux, économiques et culturels, etc. Le croisement de l'existentialisme et du réalisme rend la position de Jeanne Hersch particulièrement féconde et l'insère pleinement dans le débat philosophique contemporain sur les droits de l'homme. Ma proposition dans les pages qui suivent est de présenter cette position, de la situer dans le contexte de l'oeuvre et d'enmettre en évidence les arguments principaux. Je crois que Jeanne Hersch offre de bons arguments par rapport à plusieurs problèmes majeurs qui sont au centre du débat actuel, comme celui du fondement des droits de l'homme, de la justification de leur universalité, de la signification et de l'efficacité de la Déclaration universelle, et de l'inclusion des droits sociaux, économiques et culturels (les prétendus droits positifs) dans les droits de l'homme.